Réforme des Règles budgétaires de l’UE – accord du Conseil

4 janvier 2024

Réforme des Règles budgétaires de l’UE – accord du Conseil

Les ministres des finances de l’UE se sont accordés le 20 décembre dernier sur les futures règles budgétaires pour l’Union qui avaient été mises en suspend lors de la crise sanitaire afin d’en soutenir les conséquences économiques.

La réforme a pour objectif de moderniser et assouplir le Pacte de stabilité, un encadrement des dépenses, créé à la fin des années 90, qui limite en théorie pour chaque pays le déficit des administrations publiques à 3 % du PIB et la dette à 60 %.

Elle s’appuie sur les propositions formulées par la Commission européenne en novembre 2022 (cf. notre article) et était depuis âprement discutée entre les tenants du maintien de règles rigoureuses en matière de réduction des déficits publics et ceux souhaitant une lecture et une application plus souple de ces dispositions, afin de pouvoir conduire les investissements majeurs nécessaires aux transitions climatiques, numériques et démographiques.

Concrètement, la Commission propose que les États présentent leur propre trajectoire d’ajustement sur une période d’au moins quatre ans afin d’assurer la soutenabilité de leur dette.

Les efforts de réformes et d’investissements en lien avec les priorités stratégiques européennes liées au climat, à la transition numériques et démographiques seraient néanmoins pris en compte et permettrait d’allonger cette période d’ajustement budgétaire à sept ans.

L’accord obtenu par les Ministres des finances ouvre ainsi la voie aux discussions avec le Parlement européen.

Parmi les points sur lesquels se sont accordés les ministres figurent notamment l’obligation pour les pays dont la dette publique dépasse 90 % du PIB de ramener leur déficit à 1,5 % du PIB, tandis que ceux dont la dette excessive se situe entre 60 % et 90 % du PIB devront ramener leur déficit en dessous de 2 % du PIB.

En outre, les pays concernés devront réduire cette dette, en moyenne annuelle, de 1 % du PIB national lorsque la dette dépasse 90 % du PIB ou de 0,5 % du PIB si la dette est comprise entre 60 et 90 % du PIB.

Certaines dispositions introduites par le Parlement européen en Commission ECON permettent de renforcer le lien avec la dimension locale, même si par exemple ses membres n’ont pas retenu la proposition soutenue par notre organisation européenne d’exclure les dépenses d’investissement des collectivités territoriales du calcul de déficit.

Gouvernance à multiniveaux dans le cadre du Semestre européen et consultation des collectivités locales et régionales

En ce qui concerne l'implication des parties prenantes, y compris les collectivités locales et régionales, les députés européens ont proposé quelques amendements positifs, en ligne avec les suggestions du CCRE. C’est notamment le cas de l’article 9 qui prévoit "Avant de soumettre son plan structurel budgétaire national à moyen terme au Conseil et à la Commission, chaque État membre met en place un mécanisme de coopération structurée pour recevoir les contributions de la société civile, des partenaires sociaux, des autorités régionales et des autres parties prenantes concernées à ce plan structurel budgétaire national à moyen terme. Les recommandations et suggestions soumises dans le cadre du mécanisme de coopération structurée sont annexées aux plans structurels budgétaires nationaux à moyen terme." (2023/0138 (COD), article 9)

En outre, "les États membres examinent le rapport d'avancement au sein de leur parlement national et avec la société civile, les partenaires sociaux et les parties prenantes concernées, conformément à leur cadre juridique national". (2023/0138 (COD), Article 20).

En ce qui concerne l'implication des gouvernements locaux et régionaux dans le processus du Semestre de l'UE, qui était également une recommandation du CCRE, les députés européens n'ont pas retenu cette recommandation spécifique, mais ils proposent de renforcer le rôle du Parlement européen dans le Semestre de l'UE pour une transparence et une responsabilité accrues. Dans ce contexte, "la commission compétente du Parlement européen peut demander à la Commission et aux parties prenantes concernées, y compris les partenaires sociaux, de se présenter devant elle". (2023/0138 (COD), article 25 bis)
 

Combler le déficit d'investissement public

Cette question est également au centre de la réforme dans la mesure où l’UE et les Etats membres doivent être en capacité d’assurer les investissements indispensables à la prise en compte des enjeux climatiques, énergétiques, numériques, démographiques. Plusieurs dispositions introduites par le Parlement européen vont dans ce sens.

Ainsi, il place la réforme et l'investissement sur un pied d'égalité avec la viabilité de la dette en termes d'objectifs du cadre de gouvernance économique de l'UE. Il souligne : "Le maintien d'un niveau élevé d'investissement public est nécessaire pour atteindre les principaux objectifs de la réforme du cadre de gouvernance économique [...] et répondre aux priorités actuelles et futures de l'Union. Ce cadre pourrait être renforcé par un instrument d'investissement commun au niveau de l'Union." (2023/0138 (COD), considérant 9)

En outre, alors que les États membres sont censés respecter leur trajectoire de dépenses nettes, "pour certains investissements stratégiques qui répondent aux priorités communes de l'Union et qui ont une valeur ajoutée pour l'Union dans son ensemble, la Commission devrait être en mesure d'autoriser exceptionnellement les États membres à dépasser la valeur de référence dans le compte de contrôle", la Commission prévoit également des exceptions en raison de circonstances imprévues. (2023/0138 (COD), article 21)

Les négociations en trilogue sur la base de cet accord et de la position du Parlement européen adoptée en commission ECON le 11 décembre dernier, devrait débuter en janvier.

Pour aller plus loin :
Le rapport voté en Commission ECON du PE : https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/A-9-2023-0439_EN.html

MARTORELL

Sabine
Cheffe de projet Pôle Territoires et Cohésion
Tel.: (33) 02.38.77.86.10
sabine.martorell@afccre.org